Joe Jackson
Live 1980 - 1986 (1988)

En 1986, Joe fatigué de la vague Pop-Rock actuelle décide de créer un album moins accessible aux radios et à MTV. Il sort donc "Big World", aux intonations de World Music, malgré des sonorités Pop-Rock. En 1987, il s’essaie à un nouveau genre, la Musique Classique. Il sort "Will Power", un album instrumental, qui ne fera pas l’unanimité des critiques mais qui prouvera que Joe est un musicien hors pair. Il s'attaque une nouvelle fois à une B.O, celle du film "Tucker : The Man And His Dream" de Francis Ford Coppola en 1988.
La même année sort son premier album live, "Live 1980/86". Cet album, certainement son meilleur enregistrement en public, fait office de compilation best-of de ce que Jackson a produit entre "Look Sharp" et "Body And Soul". Il regroupe sur deux LP des extraits de concerts enregistrés en Europe (Manchester, Utrecht), en Australie (Sydney, Melbourne), au Canada (Vancouver) et au Japon (Tokyo) entre 1980 et 1986, avec quatre formations différentes. Bizarrement, alors que les 6 derniers morceaux sont issus de la tournée de "Big World", aucuns titres de cet album n'y figurent. Le bonheur se situe à tous les niveaux : réinterprétation des titres (dans le livret Joe parle de cette envie de garder le plaisir intact en changeant de musiciens et d’arrangements régulièrement, persuadé que cette joie de réinventer ses morceaux sera communicative), énergie des groupes, authenticité de la prise de son, complicité avec le public (qui parfois ne reconnaît pas les titres, puis s’enthousiasme au moment où les paroles arrivent), et diversité musicale de l’ensemble.
Ces quatre formations permettent de suivre l’évolution des orientations musicales de Jackson : assez punk et nerveux pour le premier combo, davantage Pop/Rock/Latino/Jazz ensuite (claviers et percussions supplémentaires), puis avec un gang plus serré, plus rock en 1986.
La plupart des morceaux sont des moments de vérité brute, exécutés avec brio. Pour ceux qui ont découvert ce live en connaissant les albums précédents, les sources d’émerveillement sont nombreuses : la montée de basse majestueuse de "Fools in Love", transformée en puissant slow (élégant feeling de l’immense Graham Maby dont le solo est progressivement repris par le groupe pour un final splendide) ; le duel batterie/percussions d’un "Look Sharp!" survitaminé aux claviers ludiques ; la section de cuivres pêchue ajoutée sur "Sunday Papers" ; la guitare sèche dont les accords plaqués remplacent les petits arpèges électriques de "It’s Different for Girls" ; le tube "Steppin’ Out" totalement ralenti, métamorphosé en grandiloquente séance d’hypnose nocturne, sans se départir de l’excellente mélodie originale ; "Is She Really Going Out With Him?" présenté sous trois versions différentes, le fameux "You Can’t Get What You Want (‘til you Know What You Want)" de l’album "Body And Soul", sur lequel les formidables cuivres de la version d’origine sont remplacés par la guitare de Tom Teeley qui par sa technique et quelques effets, parvient à remplir l’espace de façon époustouflante, diffusant une nappe électrique emplie d’échos au sein d’un power trio qui déménage tout sur son passage, avant que Jackson effectue un solo de synthé portable qui vire à la démence.
Malgré quelques rares faiblesses cet opus est un enregistrement live surprenant, exigeant, énergique, varié et empreint d'une forte relation avec le public. A écouter encore et encore.
Line-up : Joe Jackson (chant, piano, saxophone alto) - Joy Askew (claviers, chant, percussions) - Ed Roynesdal (claviers, violon, percussions) - Sue Hadjopoulos (percussions) - Vinnie Zummo (guitare, accordéon, claviers) - Tom Teeley (guitare) - Tony Aiello (saxophones, piccolo) - Micheal Morreale (trompette) - Graham Maby (basse, percussions, chant) - Rick Ford (basse) - Gary Sanford (guitare) - Dave Houghton (batterie) - Larry Tolfree (batterie, percussions) - Gary Burke (batterie).
écrit par Patrice
le lundi 1 novembre 2010