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mercredi 31 octobre 2012
CHRISTIAN SCOTT - Christian Atunde Adjuah (2012)
Après son dernier album "Yesterday You Said Tomorrow",
plébiscité par la critique et classé disque de l'année 2010 par
certains, le trompettiste Christian Scott revient sur le devant
de la scène avec un ouvrage monumental, un double-album tout à fait
remarquable qui rassemble 23 compositions originales, soit près de 2
heures de musique. Laissons de côté la mégalomanie du jeune homme (29
ans - il se fait désormais appeler Christian Atunde Adjuah,
un nouveau nom censé revendiquer un manifeste identitaire, celui d’un
indien noir de la Nouvelle Orléans) pour se concentrer sur la musique.
Dans ses notes de pochette, Christian Scott écrit que l'on entendra sur cet album "un déploiement du jazz et non son remplacement". Il est vrai qu'il redéfinit la carte du jazz en embrassant la tradition avec sa propre vision de la modernité où l’acoustique se marie à l’électro dans une sorte de grandiloquence. Impressionnant, le trompettiste l’est par son jeu. Il fait étalage d’une spectaculaire technique. Certainement l’un des meilleur trompettiste du monde.
Dans le premier disque, la trompette occupe une large place au sein d’une instrumentation qui la met presque constamment en valeur. Insolent, tendre, fiévreux, Scott séduit par un jeu cuivré aussi puissant que lyrique. Influencé par le rock, le funk et le hip-hop, son jazz repose sur des inventions rythmiques, des métriques inattendues qui place le groove au cœur de sa musique. Guitare et piano participent à cette mise en rythme et prennent peu de chorus.
Dans le second, guitare, piano et invités se font davantage entendre. La guitare sur "The Berlin Patient", l’un des titres les plus rock de ce répertoire, sur "Jihad Joe" et "Bartlett". Le piano sur le funky "Alkebu Lan", très présent dans "Liar Liar", "Bartlett", "I Do", pièce lente et majestueuse composée par Scott à l’occasion de ses fiançailles et dans laquelle le saxophone ténor de Kenneth Whalum III assure de magnifiques contre-chants et le dernier morceau de l'album, la magnifique "Cara", une pièce modale lente, limpide, lumineuse composée par Scott pour sa mère, la conversation pudique et tendre de deux instruments inspirés.
Christian Scott signe ici une œuvre personnelle et riche. Une certaine spiritualité qui peut ne pas émouvoir mais qui fascine de bout en bout pour celui qui se donne le temps d'écouter ce double album fleuve.
Line-up : Christian Scott (trumpet) - Matthew Stevens (guitar) - Lawrence Fields (piano) - Kristopher Keith Funn (bass) - Jamire Williams (drums).
Guests : Kenneth Whalum III (tenor sax) - Corey King (trombone) - Louis Fouche (alto sax).
Extrait : New New Orleans
Extrait : Danziger
Extrait : The Berlin Patient